Abstraction dŽmatŽrialisation : le complexe du simple

 ou lĠengloutissement de lĠartiste chercheur numŽrique

 

Remerciements : Jocelyne Tournet-Lammer, Roger Cochini, Dominique Repecaud


Comme dans un conflit ou une polŽmiques, celui qui du bout des lvres signale un caractre positif de la technologie numŽrique est immŽdiatement estampillŽ de supp™t de Bill Gates, alors que celui qui ose porter le moindre point de vue critique se trouve violement jetŽ aux oubliettes du passŽisme obscurantiste.

Au point quĠil ne puisse y avoir de vrai dŽbat sur le numŽrique. CĠest peut tre mieux ainsi, cela obligera peut-tre ˆ affiner lĠanalyse.

 

De son cotŽ, coincŽ entre sa fascination pour les champs expressifs foisonnants des possibles numŽriques et une perte de puissance due ˆ la complexification exponentielle des outils et des systmes dŽmatŽrialisŽs, lĠartiste chercheur numŽrique se demande quelle stratŽgie adopter : bouffer du code ou renoncer au monde.

 

Existe tĠil dĠautres alternatives ? Si oui quelles sont elles ?

 

En conclusion de sa confŽrence de Stockholm (Juillet 1970) "La musique et les ordinateurs", Pierre Schaeffer renvoie dos ˆ dos "deux sortes de croyances dŽrisoires"É"scientifique ou littŽraire, logicien ou artiste, pour le progrs ou l'humanismeÉ" Selon lui : "Une vraie science, mais aussi une vraie sagesse, qui est un Art de l'homme, indique qu'il faut tenir fermement les deux bouts de la cha”ne. Et È  (que) Ç la cha”ne n'a jamais ŽtŽ plus lourde pour l'homme ˆ tenir, que lorsqu'il y a un ordinateur ˆ l'autre bout."

AujourdĠhui, lĠordinateur nĠest plus celui de 1970, il est passŽ du fichage et du calcul ˆ lĠinterface de la plupart des activitŽs individuelles et sociales.

Les technologies numŽriques sont les clefs de la communication entre les humains, entre les tres et les choses et entre moi et moi mme.

LĠordinateur ce nĠest plus seulement un outil ou un support, mais le substrat incontournable de la connaissance, de lĠaction et de la crŽation.

 

Le travail de Pierre Schaeffer sĠest arrtŽ ˆ lĠaube de la rŽvolution numŽrique dont il sĠest seulement mŽfiŽ.

AujourdĠhui il y a du pain sur la planche pour questionner le monde numŽrique, comme Schaeffer lĠa fait des mŽdia. Pour ne pas nier en bloc, mais dresser le portrait, mettre en perspective lĠartiste dans son atelier, lĠhomme dans sa civilisation.

Mais il semble que les acteurs, les fondements et les attentes aient changŽs.

Quoi que !

Pour les fondements, pas si sžr, car lĠhumain reste indŽniablement au cÏur de la culture, aussi virtuelle soit elle. Mais ce nĠest dŽjˆ plus tout ˆ fait le mme homme dont il est question. Le notre est dŽjˆ ˆ la fois spectateur et acteur, utilisateur et prescripteur, artiste et ingŽnieur. Et les idŽes de Schaeffer ont souvent gagnŽ le domaine public sans leur auteur ni ses Ïures.

De la musique concrte ˆ la musique virtuelle sur supports dŽmatŽrialisŽs

Comme on lĠa appris il y a quelque annŽes avec la publication dĠIBM et lĠHolocauste dĠEdwin Black, lĠordinateur a plut™t mal commencŽ, par le fichage des dŽportŽs, mais aussi par les apports de John Von Neumann aux  Ç Manhattan project È. La radio dont PS signalait le r™le plut™t pacifique a elle aussi servi les pires causes, comme lĠorganisation en 1993/94 du gŽnocide Rwandais (Radio Mille Collines).

Dans le mme temps la musique concrte sĠest dŽveloppŽe en musique Žlectroacoustique, acousmatique, mais aussi dans le domaine pop en musique techno, Žlectro, house, ambiant, mais encore dans le domaine relationnel en musique interactive, gŽnŽrative, comportementale, en musique installŽe, remixŽe, interprŽtŽe, collaborative Éetc

Des notions, qui paraissaient complexes voir impossibles en 70, sont devenues en 1990 des Žvidences mondialement partagŽes par les jeunes gŽnŽration.  Sans parler de la boucle ou de lĠŽchantillon trop connus, on peut citer les soundfonts (des collections de son modulables), les allures non gestuelles ou plus rŽcemment la synthse par descripteurs (un descripteur nĠest autre que ce que PS apellait un critre typo et motphologique), par exemple la synthse concatŽnative par corpus de Diemo Schwarz.

 

 

DĠautres sont tombŽes en dŽsuŽtude ou ont ŽtŽ laminŽes par lĠoubli o la btise.

Par exemple la recherche artistique partagŽe basŽe sur des objectifs de contenus et de formes,

 

A mesure que lĠordinateur devenait lĠoutil central de la crŽation, la programmation numŽrique a pris une importance grandissante dans le mode de production des Ïuvres, remplaant le support, la notation, lĠinterprte, la partition, parfois le chef dĠorchestre, les instruments, les musiciens ou le compositeur.

Paralllement, la dŽpendance vis ˆ vis des produits industriels : ordinateurs, logicielsÉ cĠest accrue.

Un certain savoir faire technique et les moyens convoitŽs des studios de recherches et crŽation musicale sont aujourdĠhui rŽduits ˆ lĠŽchelle dĠun iphone.

(Antoine de Saint Exupery dans "Vol de Nuit")

" Il semble que tout lĠeffort industriel de l'homme, tous ses calculs, toutes ses nuits de veille sur les Žpures, n'aboutissent, comme signes visibles, qu'ˆ la seule simplicitŽ, comme s'il fallait lĠexpŽrience de plusieurs gŽnŽrations pour dŽgager peu la courbe d'une colonne, d'une carne, ou d'un d'avion, jusqu'ˆ leur rendre la puretŽ ŽlŽmentaire de la courbe d'un sein ou d'une Žpaule. [...]
Il semble que la perfection soit atteinte non quand il nĠy a plus rien ˆ ajouter, mais quand il nĠy a plus rien ˆ retrancher. "

Mais lĠapparente simplicitŽ cache ici la plus grande complexitŽ.

 

Quelle place la crŽation industrielle laisse tĠelle au crŽateur ?

 

 

Nous sommes confondus entre deux extrmes improbables :

A) entre lĠidŽe que les objets technologiques qui se vendent sont des outils de consommation et non de crŽation, que le cožt dŽmesurŽ de leur dŽveloppement fait nŽcessairement lĠimpasse, sauf accident de parcours sur le caractre ouvert et la possibilitŽ de crŽation.

B) ou celle que les seules choses qui intŽressent au fond les tres humains et donc qui en fait des acheteurs potentiels est bel bien une forme de libertŽ, de crŽation et dĠexpression individuelle dĠou le succs du Personnel Computer.

 

De nombreux artistes utilisent les outils de crŽation numŽriques disponibles sur le marchŽ sans essayer de les dŽpasser dans lĠespoir dĠimiter leurs modles.

DĠautres pathŽtiques sĠefforcent de les dŽtourner ou de les utiliser prŽtendument dans le but de les subvertir.

 

Mais imaginons maintenant quĠun artiste souhaite tout naturellement utiliser la technologie comme outil pour parvenir ˆ mes fins crŽatifs.

 

Ne se retrouve tĠil pas dans lĠobligation dĠouvrir la boite de pandore de la complexitŽ numŽrique ?

Ds quĠil dŽmonte la faade bien polie, la mŽcanique la plus complexe est mise ˆ jour.

Et plus le temps passe, plus cette complexitŽ sĠaccroit, possiblement en fonction exponentielle de la multiplication des usages.

 

Dans lĠespoir dĠaccompagner cette fonction crŽative, des artistes, des concepteurs et des dŽveloppeurs crŽatifs, aidŽ de petites sociŽtŽs, des regroupements collaboratifs de dŽveloppeurs ont crŽŽ des outils plus ouverts, trs utilisŽs par les artistes dont les plus connus sont Max MSP, Pure Data, Processing, Arduino É Les communautŽs dĠutilisateurs mondialisŽes sont trs Žtendues : quelques milliers dĠutilisateurs professionnels dans le monde pour chacun des outils citŽs plus des centaines de milliers dĠamateurs et dĠoccasionnels.

Mais la pratique des langages ouverts montre que les utilisateurs se contentent le plus souvent de modifier lŽgrement les briques de base, mais ds quĠil recherchent un rŽsultat prŽcis, butent sur les limite de la conception de ces briques aussi puissantes gŽnŽriques soient elles.

Donc lĠhorizon des outils de crŽation numŽrique recule ˆ mesure quĠon avance, au delˆ des outils auteurs, des langages ouverts, des librairies partagŽes, des dŽveloppements collaboratifs, des noyaux open sourceÉ reste toujours la montage infranchissable de la complexitŽ numŽrique ˆ la fois potentiel de crŽation et frustration.

On peut penser que plus le niveau de programmation descend, plus la libertŽ de crŽation est grande, cĠest vrai, mais Žgalement plus le temps de dŽveloppement et la dŽpendance vis ˆ vis des changements du systme et du hardware des constructeurs augmententÉ

Perdre ses repres, tre submergŽ par le flux informationnel, ne pas rŽussir ˆ finaliser une crŽation, ni mme une action simple apriori.

Comment se manifeste la frustration numŽrique :

Je voudrai composer une nouvelle pice musicale, jĠessaie de crŽer un gŽnŽrateur qui duplique et module un motif sonore, je nĠarrive pas ˆ dupliquer le motif, jĠessaie de multiplier les instances du gŽnŽrateur, je mĠŽloigne, pour finir, le logiciel plante et ma sauvegarde refuse de sĠouvrir ˆ nouveau.

Le blocage par les bugs

Le bug a sa mŽtaphysique, il semble se dŽrober ˆ lĠexpŽrience, le temps est arrtŽ, rien ne fonctionne, la musique ne joue pas, quelque chose bloque mais quoi, on trouve une solution, un autre problme appara”t, de temps en temps, une erreur si peu dŽterministe en apparence que cĠest comme si elle Žtait alŽatoire, ou vivante, le bug. Finalement la chose tombe en marche, mais ne produit que ce quĠon lui a demandŽ de faire cĠest ˆ dire pas ce quĠon espŽrait quelle fasse, une chose tellement mŽcanique, triviale.

Techno dŽpendance

LĠacteur efficient, capable dĠagir dans le monde numŽrique, cĠest ˆ dire le monde contemporain nĠest plus lĠartiste, ni le designer, ni lĠarchitecte, ni le politique ni le philosophe, cĠest le dŽveloppeur. Le hŽro des temps est le hacker. Les artistes et les entreprises font la queue devant les crŽateurs de code.

Sans une maitrise avancŽe du code, pas de crŽation, pas de communication et finalement paradoxalement pas de matŽrialitŽ, seulement des gŽnŽralitŽs, des intentions idŽologiques souvent floues, des senseurs, des utopies au bar desquels nous sommes accoudŽes.

Quel projet artistique est ˆ lĠÏuvre ?

De nouvelles formes, de nouveaux genres, de nouveaux imaginaires, de nouvelles expŽriences et relations ˆ lĠexpression sonore.

Arbitrer entre gadgetisation service

On dŽcide difficilement de ce qui est utile et de ce qui ne lĠest pas, surtout quand le marchŽ dŽcide, par contre on peut donner prioritŽ aux nŽcessitŽs vitales aux besoins ou aux dŽsirs et espŽrer une rŽgulation des objets. Dans le domaine immatŽriel, les besoins essentiels sont moins clairs et les objets superflus peuvent avoir moins dĠeffets dramatiques que leurs formes physiques.

 

StratŽgies personnelles, stratŽgies collectives, postures et idŽologies

On peut trs bien voir la crŽation artistique comme une pratique indŽpendante de la technologie, mais jusquĠˆ quel point ?

 

On est souvent portŽ ˆ se positionner selon les personnes ˆ qui lĠon sĠadresse, soit comme un pro technologie, soit comme un anti. Pourquoi faut il toujours retomber dans ces ornires ridicules, entre les supp™ts de Bill Gates et les anti modernitŽ ? Alors que le propos est ailleurs, cĠest lĠart la cultureÉ

 

JĠessaie donc plusieurs stratŽgies :

StratŽgies individuelles

Technophile idŽologue du gadget ou fascinŽ par les machines, riche de surcroit
Hacker Žthique
IntŽressŽ pour le pouvoir et lĠargent
ConcernŽ cherchant ˆ maitriser mais perdu dedans
Curieux mais pas trop
Adoptant des stratŽgies de contr™le
Utilisateur lambda
Qui Žchappe car refuse de sĠen occuper, investissement volontairement minimum
Qui pense la technologie en connaissant le minimum
Technophobe rejetant en bloc

 

StratŽgies Collectives

Chacun pour soi. Je dis que cĠest facile quand je sais. Je me tais quand je ne sais pas
Vendre ses connaissances. JĠapprend vite
Vendre autre chose en communiquant les connaissances
ProsŽlyte superfŽtatoire
Critique global ou approximatif
Critique ciblŽe
Partage de connaissances et dŽveloppement collaboratif
Open source et creative commons
Enseignement et pŽdagogie individualisŽe
Organisation de partage et dĠassistance
Assistance technique individuelle aux personnes

 

Ces postures sont aujourdĠhui de premire importance et leurs consŽquences socio culturelles sont sŽrieuses.

Les premiers ˆ lĠavoir compris sont les dŽveloppeurs ou plus prŽcisŽment les hackers comme le montre  Pekka Himanen  dans son livre LĠƒthique hacker.

 

Pourquoi faire la crŽation numŽrique ?

La question nĠest pas de savoir si elle peut concurrencer J.S.Bach est une interrogation vaine.

Pour moi il sĠagit de crŽer des objets et des situations non triviales, des catalyseurs culturels fondamentaux du monde contemporain. Il sĠagit dĠutiliser les outils et les reprŽsentations contemporaines pour les potentialitŽs inventives et expressives quĠils portent, avec la technique et la technologie contemporaines comme support. Non pour faire la dŽmonstration des machines, comme ce fut et cĠest souvent le cas, mais pour dŽvelopper lĠimaginaire.

Pierre Schaeffer et dĠautres avant lui ont bien rŽussi ˆ sĠextraire dans une large mesure de la mŽlodie, de la tonalitŽ, de la mŽtrique mŽcanique, de la structure musicale aprioriÉ Pourquoi ne pourrait-on pas sĠextraire de la vision rŽductrice commune de lĠart et de la musique comme de notre dŽpendance ˆ machine ?

CrŽer de nouvelles expŽriences humaines ambitieuse :  quelques exemples dĠidŽe :

Accompagner la transformation des images en objets,

Reproduire les paroles gelŽes matŽrialisŽes dans lĠespace physique,

Sculpter ˆ main nue la matire sonore en temps rŽel,

Orchestrer la fusion du verbe et de la vision,

Composer avec lĠubiquitŽ des messages et objets,

 

Rythmer lĠespace sonore,

CrŽer des corps physiques capable de danser ˆ la vitesse des Žvnements musicaux,

Naviguer de manire multimodale, jouer dans des jardins virtuels avec des tres imaginaires,

Dialoguer avec les choses,

Utiliser la notation comme reprŽsentation et la reprŽsentation comme instrument avec des partitions navigables ou des partitions instruments,

Utiliser les objets comme instrument et comme notation,

Intervertir, relier, mapper entre elles diffŽrentes modalitŽs de perception/reprŽsentations, construire des chaines multimodales

 

Explorer lĠinfiniment petit qui nous entoure en en faisant lĠexpŽrience concrte

Bricoler les atomes, les molŽcules, les gnes ˆ main nue,

Traquer les singularitŽs de vie artificielle dans les rŽseaux,

RŽaliser des reprŽsentations visitables de lĠinconscient, de la mŽmoire ou de lĠau delˆ ici basÉ

Apprendre ˆ voler avec tout le corps

CrŽer des systmes dĠenseignement individuels sĠadaptant prŽcisŽment et en temps rŽel ˆ la comprŽhension de lĠŽlve

 

On vient toujours de quelque part

La crŽation numŽrique, artistique ou industrielle aussi abstraite et virtuelle soit elle sĠappuie souvent sur une approche concrte, surtout dans les domaines sonores, mais aussi dans celui des images.

On peut distinguer deux catŽgories dĠobjets : ceux appartenant au domaine des effecteurs, cĠest ˆ dire les sons et les images eux mmes,  les corpus dĠobjets audiovisuels ou audiographique que lĠartiste manipule et qui constituent la matire des Ïuvres. Dans ce domaine la crŽation est ancrŽe dans lĠapproche Shaefferienne.

Et ceux appartenant au domaine des actionneurs, les actions qui produisent les sons et les Žvnements visuels, qui sont soumis ˆ des modes dĠactivation, interaction, comportement, actions que Schaeffer rangeait dans le domaine causal.  Domaine historiquement ancrŽ dans lĠapproche expressive et se rapproche davantage de la pensŽe instrumentale. Ces deux objets complŽmentaire sont le plus souvent indissociablement liŽs dans la crŽation numŽrique. On est donc tout ˆ la fois dans le concret et lĠabstrait, lĠexpression instrumentale et le montage, le fixŽ et lĠimmatŽriel.

 

Construire une approche compŽtente et rŽflŽchie des technologies contemporaines

Mieux comprendre en travaillant les techniques ˆ plusieurs

DŽvelopper en Europe les mŽthodes pŽdagogiques, apportant les fondements scientifiques, les mŽthodes techniques, les pratiques expressives, la recherche fondamentale.

Entreprendre des projets collectifs structurŽs, quĠil sĠagisse de recherche, de crŽation, de dŽveloppement, de valorisation ou dĠindustrialisation.

Partager la connaissance et la rendre accessible ˆ tous

 

Pierre qui roule nĠamasse pas mousse

Pendant sa vie, Pierre Schaeffer sĠest consacrŽ ˆ faire conna”tre et comprendre ses idŽes au plus grand nombre par la tŽlŽvision, la radioÉ Depuis quĠil est mort, son Ïuvre a ŽtŽ enterrŽe avec lui. Presque totalement oubliŽ.

Il est essentiel de faire conna”tre le travail de Pierre Schaeffer aujourdĠhui avant quĠil ne soit trop tard.

En rendant accessible sur Internet les ŽlŽments les plus importants de son Ïuvre.

En traduisant ses livres, en sous titrant ses films,

En organisant une sŽrie de cours et en allant les donner dans les universitŽs ˆ lĠŽtranger, nous avons tout ce quĠil faut pour a. Il suffit dĠy aller, les bonnes volontŽs ne manquent pas.

En faisant sauter pour raison dĠutilitŽ publique les verrous qui en interdisent funestement la diffusion.

Il faut arrter de croire que Schaeffer est oubliŽ par ses ennemis ˆ cause de ses positions gnantes ou dŽrangeantes. CĠest de la pure parano•a. On nĠa jamais autant citŽ Schaeffer quĠˆ lĠIrcam. La rŽalitŽ est peut-tre plut™t que Pierre Schaeffer est mis sous le boisseau par ses amis frustrŽs, jaloux et dŽconnectŽs du monde contemporain, usant de leur pouvoir de rŽtention, le seul qui leur reste.

 

Allez ! Finissons sur une note lŽgre

En prŽface de Ç Faber et sapiens È (sauf erreur) Pierre Schaeffer cite cette anecdote :

Un scaphandrier est au fond de lĠeau, son collgue est ˆ bord. Pris de panique il embouche le tuyau acoustique et alerte son camarade : Ç remonte on coule È

 


ComplŽments et annexes :

IBM et lĠHolocauste 1

(Article de Gregory Chatonsky mars 2001)

Ç IBM et lĠholocauste ÈÉ Passons sur le titre, cĠest un ouvrage amŽricain. MalgrŽ une certaine virulence de lĠauteur, les documents semblent valables et le propos est argumentŽ. Si tout cela se rŽvle vrai, cela aura quelques consŽquences sur ma conception et mon usage de lĠinformatique. En effet, jĠavais na•vement cru ˆ une distinction historique entre les techniques industrielles et les technologies de traitement de lĠinformation. Je rŽpartissais ainsi les premires du c™tŽ de la Shoah et les secondes du c™tŽ militaire (cf Enigma). Bien sžr ce raisonnement avait ses limites dans la mesure o lĠorganisation concentrationnaire Žtait Žgalement fondŽe sur une structure de type militaire et administrative, mais je pensais malgrŽ tout pourvoir distinguer deux plans historiques, et donc deux horizons diffŽrents. Ce livre dŽmontre ˆ renfort de documents dĠarchives et de recoupements judicieux, lĠimplication dĠIBM et de ses machines calculants ˆ lĠorigine des ordinateurs dans lĠorganisation, la planification de la Shoah et du systme concentrationnaire. Au-delˆ de la question morale, qui mĠintŽresse assez peu, ceci signifierait que la computation est fondŽe (mais pas seulement) non sur la production dĠinformations, mais sur lĠorganisation dĠinformations pour contr™ler des tres humains. Remettant ainsi en cause le statut productif et imaginaire de lĠinformatique, statut qui deviendrait le fantasme de quelques artistes, la fonction primordiale de celle-ci serait le traitement des individus et leur Ç rationnalisation È, leur quantification, leur rŽification. Sans vouloir tomber dans les simplifications de Virilio, la question du contr™le, de la ma”trise sera au coeur des problŽmatiques du cyberespace. Tout le problme est de problŽmatiser cette idŽe hors de toute perspective moraliste et dŽnonciatrice.

La tŽlŽvision selon Jean Baudrillard est dĠabord un objet physique et un signe social

Vive la dŽmatŽrialisation

Jamais on a produit consommŽ et donc jetŽ et recyclŽ autant de matire

Donc consommer moins de matire => dŽmatŽrialiser les services et les usages

Les biens immatŽriels ne sont devenus aliŽnables. (Plus seulement culturels, mais aussi sociaux, valorisable, commerciaux. Inversement lĠunivers culturel sĠŽtend ˆ lĠindustrie, au nŽgoce dŽpassant le simple marchŽ de la crŽation)

 

Vive la rŽ matŽrialisation

La tendance ˆ la dŽmatŽrialisation du virtuel est souvent compensŽe par une rematŽrialisation. Cette rematŽrialisation inscrit le service numŽrique communicant dans la rŽalitŽ tangible. Une partie importante du design contemporain travaille aujourdĠhui ˆ rendre tangibles les services dŽmatŽrialisŽs. Par exemple en remplaant les objets par les gestes y faisant rŽfŽrence : tŽlŽphoner, monter le son, ouvrir la porteÉ mais Žgalement sous la forme dĠobjets/interfaces physiques, capteurs, systmes tactiles, enaction, rŽalitŽ augmentŽeÉ

Il est difficile dĠŽvaluer lĠŽconomie de matire et de dŽchets gagnŽ gr‰ce ˆ la dŽmatŽrialisation : Žconomie de papier de supports analogiques, de transportsÉ

Mais on peut plus mesurer la pollution due aux les appareils Žlectroniques car le numŽrique est malheureusement aussi matŽriel : Les Nations unies estiment que 20 ˆ 50 millions de tonnes de dŽchets Žlectroniques sont gŽnŽrŽs chaque annŽe dans le monde, ce qui reprŽsente selon une enqute de Greenpeace sur les e-dŽchets rŽalisŽe en 2008 plus de 5% de lĠensemble des dŽchets mŽnagers. Les progrs en rŽduction de produits polluant, miniaturisation, recyclage sont semble tĠil loin de compenser lĠaccroissement des quantitŽs des produits Žlectroniques actuelles et ˆ venir.

La lutte pour la dŽmatŽrialisation est loin dĠtre gagnŽe.